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Culture tout azimut

Ce blog Culture tout azimut vous propose des articles sur des livres récemment lus. Les lecteurs sont invités à partager leurs points de vue.

L'Amante de l'Arsenal

Nouveau tome du journal intime de Gabriel Matzneff

Nouveau tome du journal intime de Gabriel Matzneff

Aujourd’hui je vais évoquer L'Amante de l'Arsenal le nouveau tome des carnets noirs de Gabriel Matzneff dont le sous-titre est Journal 2016-2018. Dans ces pages de son journal intime récent l’écrivain relate ses rencontres, ses dîners, ses amours, ses passions, ses colères et ses lectures. C’est désormais un vieil homme qui porte toujours beau, prends soin de son corps mais dont la santé est fragile. Il arrive au crépuscule de sa vie. D’ailleurs, dans ces nouveaux carnets il est moins régulier que par le passé dans son activité de diariste scrupuleux et méticuleux.

La principale date à retenir est le samedi 19 novembre 2016, jour où le protagoniste fait une rencontre qui va bouleverser sa vie sentimentale. Matzneff est séduit par et séduit Virginie (un pseudonyme) : la jeune femme est L'Amante de l'Arsenal en référence au lieu où s’est déroulée leur rencontre initiale.Il est octogénaire, elle n’a pas encore trente ans. Elle aspire à rentrer au Carmel et à prendre le voile, mais auparavant elle souhaite vivre cet amour intense avec lui. Virginie est l’incarnation du paradoxe, sublime amante charnelle totalement soumise au Christ. Dès lors, entre fréquentation des lieux de cultes et études liturgiques et religieuses, elle rejoint régulièrement son amant dans son placarddu quartier latin. C’est un écrivain épicurien et fauché, qui vit dans le dénuement et la solitude. Heureusement il a ses amis avec lesquels il dîne, va au cinéma ou aux vernissages d’expositions, se promène au bord de la Seine ou au jardin du Luxembourg. Matzneff est âgé, dans les pages de son journal les morts sont nombreux, il se rend au cimetière pour les accompagner dans leur ultime demeure. Il est attentif à l’actualité contemporaine, il est un fervent défenseur de la Russie, il méprise certains politiques (Hollande notamment), il est plus intéressé par l’Italie, où il séjourne souvent en particulier à Naples et à Rome, que par la France. Plus fidèle en amitié qu’en amour, il est cependant prudent : sous la houlette des services juridiques de son éditeur il fait en sorte que tous les noms ne soient pas identifiables. Il aime évoquer les jeunes personnes du sexe avec lesquelles il a vécu de sublimes histoires d’amour. Cependant, ses mots ne sont pas exempts de misogynie, il supporte très mal que certaines aient renié leur passé tendre avec lui et aient coupé tous les ponts. Il ressasse, vilipende, jalouse et encense alternativement. Mais il n’oublie pas, jamais ; les prénoms féminins croisés dans les opus précédents reviennent comme des leitmotive hanter ces pages où les souvenirs côtoient le présent et ses bonheurs éphémères. Et bien entendu Virginie est omniprésente, c’est en quelque sorte l’héroïne actuelle, elle est celle qui permet à Matzneff malgré ses déboires de goûter encore aux plaisirs de l’amour. Une partie de leurs échanges d’émiles, de lettres et de sms sont inclus dans ces pages. Leur relation affective est parfois houleuse mais Matzneff est apaisé par cet amour, le dernier peut-être, auquel il pensait ne plus avoir droit. Sa prose est souvent très belle, même si l’exercice du journal est parfois répétitif ; de longs passages en latin ou en italien sont à la fois charmants et pédants ; les menus des repas et les millésimes des breuvages sont superflus.

L’Amante de l'Arsenal montre un homme en déclin, moins alerte qu’à son apogée, atteint par la vieillesse comme en témoignent ses deux chutes et ses fréquentes consultations chez l’ophtalmologue, l’oncologue et le cardiologue. Ses préoccupations restent inchangées : la religion orthodoxe avec le jeûne du Carême, la diététique, l’amitié, l’Italie et l’écriture sont au centre de son existence. Il confie moins de détails sur sa vie sexuelle, il évoque ses délicieuses oaristys, conversations amoureuses, avec pudeur et distance. Il est à noter que la publication de cet opus est relativement proche des faits couverts et qu’il manque toujours la parution d’années cruciales et scandaleuses prévue après le décès de l’auteur.

Voilà, je vous ai donc parlé de L'Amante de l'Arsenal de Gabriel Matzneff paru aux éditions Gallimard.

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