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Culture tout azimut

Ce blog Culture tout azimut vous propose des articles sur des livres récemment lus. Les lecteurs sont invités à partager leurs points de vue.

L'éducation au voyage

Un essai sur les voyages

Un essai sur les voyages

Aujourd’hui ma chronique est consacrée à l’essai dirigé par Emmanuelle Peyvel intitulé L’éducation au voyage. Cet ouvrage s’intéresse aux Pratiques touristiques et circulations des savoirs. Il s’agit d’une approche originale transdisciplinaire associant sociologie et géographie ; plusieurs contributeurs ont collaboré aux treize chapitres de l’ouvrage. L’adage bien connu les voyages forment la jeunesse  est en quelque sorte le fil rouge de cet essai. Plusieurs résultats d’enquêtes de terrain sont présentés et discutés. Les auteurs montrent que voyager s’apprend et que ce qui est appris à cette occasion peut être mis en pratique dans un contexte autre que celui du voyage. Dans l’introduction, deux slogans paradigmatiques résument l’enjeu de cette recherche : apprendre à voyager vs voyager pour apprendre. Les titres des trois parties sont les suivants : Former la jeunesse par le tourisme, Circulations des savoirs touristiques et Tourisme et éducation à l’environnement. La notion d’éducation est donc bien centrale dans l’ouvrage. La thèse défendue ici est à l’opposé de celle de Jean-Didier Urbain dans son essai L’idiot du voyage.

Chaque partie est composée de plusieurs chapitres afin de proposer un spectre large de la problématique abordée. Voici le résumé de quelques unes des principales idées développées. Tout d’abord, un constat sociologique s’impose : selon le milieu social d’origine les opportunités de voyage et donc d’apprentissage par le voyage ne sont pas égalitaires. Ce thème a été largement documenté, il suffit de se référer par exemple aux livres de Jean Viard sur l’usage du temps libre. Ainsi, l’exemple des séjours linguistiques montre comment ces échanges scolaires sont l’occasion de parcours fléchés permettant de découvrir les incontournables locaux et de faire du tourisme en visitant des villes étrangères, parfois même au détriment de l’apprentissage de la langue. Cependant, ce type de voyage reste un des marqueurs de la construction sociale de l’élite. Le cas des séjours à visée humanitaire est également évoqué. Les auteurs montrent que ce type de voyage est un atout figurant sur un CV. Les dominants l’ont compris et ils incitent leur progéniture à s’inscrire dans ce type de parcours. En effet, il existe un réel enjeu de socialisation pour la future élite par ce biais. Un long développement est consacré aux bourses Zellidja, institution française du vingtième siècle, qui permettent aux jeunes de mener à bien des projets pour partir à la découverte des autres. Dans le même ordre d’idée, l’initiative portée par la région Aquitaine, Sac Ados, est présentée. L’institution territoriale contribue au financement de voyages en France ou à l’étranger au profit d’adolescents s’inscrivant dans cette démarche. Grâce à ce dispositif, un plus large accès au voyage et à l’éducation induite est offert. Enfin, le voyage en famille peut être pour les jeunes l’occasion d’expérimenter un début d’autonomisation qui concourt à leur socialisation. Il est intéressant de suivre l’enquête conduite dans un camping de la région landaise et de constater tous ces micros apprentissages favorisés par la période du voyage.

Dans la deuxième partie de l’ouvrage, après des éléments théoriques pour aider à penser les enjeux du tourisme, les auteurs s’intéressent aux connivences entre le voyage et la recherche scientifique par exemple éthologique ou biologique. Les lieux de travail des savants ont tendance à être appropriés par le tourisme et des tours ad hoc sont construits pour offrir aux voyageurs des chances d’approcher certains animaux ou des tribus isolées. La mondialisation accentue ce phénomène, dont les conséquences en termes de pollution, de saccages ou de contamination doivent être contenues. La question de réserver ces voyages à des happy few est présente en arrière fond. Enfin, l’essai aborde dans sa dernière partie la question de la sereine cohabitation entre les touristes et les lieux visités. En effet, le tourisme a un impact sur les populations visitées et/ou la nature explorée. Plusieurs exemples sont étudiés. La forêt de Fontainebleau, proche de Paris, est emblématique des tensions possibles entre l’essor du tourisme avec l’augmentation de la fréquentation du lieu et l’aspiration légitime à la tranquillité des riverains. Un code de bonne conduite dans la forêt existe ; la surveillance des activités qu’y pratiquent les visiteurs est effective et comparée à ce que la règle ou la loi autorise. En Italie, la baie de Naples est l’objet de convoitise touristique et l’inscription d’une partie du lieu comme zone protégée est analysée avec les bénéfices induits et les contraintes émergentes. Un autre exemple est celui des activités sportives en montagne avec l’indispensable responsabilisation des pratiquants pour les sensibiliser à la nécessaire protection de l’environnement.

Cet essai sur L’éducation au voyage est intéressant mais un peu disparate et au final décevant. En effet, plusieurs recherches intéressantes sont présentées avec des résultats pertinents mais peu de liens sont tissés entre les différentes perspectives. Les apprentissages multiples liés au voyage sont bien mis en exergue. Les auteurs montrent que les compétences ainsi acquises peuvent être réutilisées et surtout que voyager s’apprend et permet de développer des compétences pour se repérer, communiquer, se déplacer.

Voilà, je vous ai donc parlé de L’éducation au voyage d’Emmanuelle Peyvel paru aux éditions PUR.

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