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Culture tout azimut

Ce blog Culture tout azimut vous propose des articles sur des livres récemment lus. Les lecteurs sont invités à partager leurs points de vue.

Le jeune bourreau

Le récit bouleversant des agressions sexuelles subies par un gamin

Le récit bouleversant des agressions sexuelles subies par un gamin

Aujourd’hui je vais évoquer Le jeune bourreau récit bouleversant et terrifiant de Thomas Misrachi. Près de cinquante ans après les faits, le narrateur se souvient et raconte.

Le jeune bourreau est l’histoire de Thomas Misrachi, des agressions sexuelles traumatisantes subies lorsqu’il avait six ans en famille. Alors que son père est près de mourir, l’hôpital de Remiremont le contacte et l’auteur le rejoint pour une dernière conversation, l’ultime confrontation pour essayer de comprendre, savoir ce qu’il savait du drame qui est resté couvert par une chappe de plomb. Le vieil homme n’avoue rien, il continue à se taire sur l’essentiel. Ce récit est un cri hurlé comme une libération Misrachi précise à la fin : « ce texte, je ne l’ai pas écrit, je l’ai vomi. Ces mots, je ne les ai pas couchés sur le papier, je les ai dégueulés. »D’ailleurs il est incapable de le lire, en parler est probablement difficile puisque le contenu représente une révélation intime. Cette impossibilité me rappelle ce que disait Laure Adler à propos d’A ce soir bouleversant texte sur son fils disparu. Le lecteur ne découvre pas tout de suite qui est Le jeune bourreau. Voici quelques précisions tardives sur cet adolescent : « il s’appelait Bertrand. Il avait quinze ou seize ans. Il était grand. Il était en lycée agricole. (...). Je me souviens qu’il avait de gros biceps. Qu’il aimait les montrer. Qu’il portait de petites lunettes, une monture simple, ovale et argentée. Pour moi il était grand. Je ne sais pas s’il l’était vraiment. C’était le beau-frère de mon père, le frère de ma belle-mère, sa nouvelle compagne. » Cette dénomination n’est que le titre du livre car il n’était : « presque pas un bourreau. Un « presque bourreau », voilà ce qu’il est puisque rien ne lui a jamais été reproché. Pas de cris, pas de bruit, pas d’accusations, pas de plainte. Pas de victime ou de scène de crime. Pas de sang sur les mains, pas plus sur les murs. Pas de cadavre, pas d’enquête. » Dans la chambre de Thomas, Bertrand s’immisçait et se masturbait sur ses fesses pendant de nombreuses nuits. Il faisait régner une atmosphère de terreur et de crainte. Sa position d’aîné dominant lui a permis ses agissements en toute discrétion. Personne n’a défendu la victime qui a : « été un témoin silencieux. J’éprouve pour lui parfois une sourde colère et un profond dégoût. Je ressens parfois de la haine. » Dans sa jeunesse Bertrand meurt dans un accident de la route, sans jamais avoir été inquiété par la justice pour les agressions sexuelles qu’il a commises. Et comme l’écrit l’auteur : « ceux qui meurent ne s’excusent pas. Ils se libèrent, se lavent, se vident, vomissent leurs regrets, leurs fautes et leur honte en espérant une rédemption. » Il ajoute plusieurs décennies après le traumatisme : « on ne guérit jamais de certaines blessures. Le vide ronge. On ne se débarrasse jamais entièrement des démons, de ses cicatrices, de la douleur et du fracas. L’enfance ne s’efface jamais. » Sur son lit de mort le père ne dit pas grand-chose, le secret perdure, son fils ne peut le pardonner bien qu’il ait accepté de se rendre à son chevet. Le constat est terrible : « ce qui se passait en famille, personne n’en faisait la publicité. C’était le déshonneur et le désaveu assurés. Quand on est fort, on ferme sa gueule. Quand on est faible aussi. Et nous nous y sommes tenus. L’histoire a disparu. Son fantôme aussi. »

Le jeune bourreau est une sorte de catharsis, une remémoration d’un trauma qui n’a jamais été reconnu ni réparé. Ce portrait d’un prédateur sexuel impuni est contondant et déchirant, l’auteur comme dans un souffle brûlant déverse sa version des faits, ses souvenirs mémoriels enfouis dans sa psyché.

Voilà, je vous ai donc parlé du Jeune bourreau de Thomas Misrachi paru aux éditions Grasset.

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