Le royaume désuni

Le nouveau roman de Jonathan Coe

Aujourd’hui je vais évoquer Le royaume désuni le nouveau roman de Jonathan Coe traduit par Marguerite Capelle. Il est notamment l’auteur d’Expo 58 et de Numéro 11.

Le royaume désuni raconte à travers l’histoire d’une famille anglaise l’histoire de l’Angleterre au vingtième siècle, plus précisément de la victoire de 1945 à l’épidémie de covid-19. C’est en quelque sorte la narration du déclin d’une grande nation par le prisme de l’histoire individuelle. En effet la période commence avec la fin de la seconde guerre mondiale avec la domination sur les nazis et s’achève avec le Brexit et l’exclusion volontaire du Royaume Uni de l’Europe et de ses institutions politiques. Entre temps, la décolonisation s’est achevée et la famille royale s’est imposée comme scandant l’Histoire en marche avec ses fastes et ses scandales. Les parties du roman correspondent à des dates importantes pour le pays : 8 mai 1945 avec la fin de la guerre, 2 juin 1953 avec le couronnement de la reine Elisabeth II, 30 juillet 1966, avec la finale victorieuse sur l’Allemagne de l’ouest de la coupe du monde de football, 29 juillet 1981 avec le mariage du Prince Charles et de Lady Diana, 6 septembre 1997 avec les funérailles de Lady Diana et enfin 8 mai 2020, avec la célébration des soixante-quinze ans de la Victoire. L’action se déroule à Birmingham, plus précisément à Bournville, d’où sont originaires les protagonistes (un arbre généalogique complexe les présente en début du bouquin). Dans cette région, l’un des principaux employeurs est la chocolaterie internationalement connue : « depuis la Seconde Guerre mondiale, Cadbury diluait le cacao composant son chocolat avec une petite quantité de matières grasses végétales (pas plus de cinq pour cent en règle générale), et les consommateurs britanniques avaient développé un goût pour cette formule. » Cette recette sera à l’origine de combats européens sur les normes et les appellations. Cet exemple est paradigmatique des confusions et exigences réglementaires européennes. Mary Clarke est présente tout au long de cette épopée d’abord comme enfant, puis comme femme, comme mère et grand-mère. La fin du roman s’achève par sa disparition suite au covid et la détresse de ses proches qui ne peuvent l’approcher pour cause de distanciation sociale. Cette conclusion est une sorte de métaphore du déclin du pays qui en s’isolant se marginalise et ne parvient plus à rendre sa population heureuse. Boris Johnson est un des protagonistes ; d’abord journaliste à Bruxelles puis fer de lance de l’émancipation de l’Europe avant de prendre les rênes du pays. Le royaume désuni fait la part belle aux Windsor, les quelques critiques qui émanent de la part de certains personnages restent discrètes et feutrées. Et il ne faut pas oublier les films de James Bond qui ponctuent les décennies et sont une référence de la distinction anglaise. Chacun des épisodes historiques majeurs est l’occasion de mettre en scène la famille Clarke et ses différentes générations sur un stade, dans un pub, sur le parcours d’un cortège royal ou dans l’intimité douillette de la famille.

Le royaume désuni est un charmant roman qui se lit facilement. En quelques dates emblématiques Jonathan Coe synthétise l’essentiel de l’histoire contemporaine et rend hommage à son pays sans rien cacher des dérives qui l’affectent.

Voilà, je vous ai donc parlé du Royaume désuni de Jonathan Coe paru aux éditions Gallimard.

Numéro 11 - Culture tout azimut

http://culture-tout-azimut.over-blog.com/2016/11/numero-11.html

Chronique sur un précédent ouvrage de Jonathan Coe