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Culture tout azimut

Ce blog Culture tout azimut vous propose des articles sur des livres récemment lus. Les lecteurs sont invités à partager leurs points de vue.

Le fils du pêcheur

Roman autofictionnel de Sacha Sperling

Roman autofictionnel de Sacha Sperling

Aujourd’hui je vais évoquer Le fils du pêcheur roman de Sacha Sperling. Ce jeune auteur est le fils d’Alexandre Arcady et de Diane Kurys, réalisateurs de films. Son cinquième roman est autobiographique et s’apparente à une autofiction impudique.

Le narrateur et personnage principal du Fils du pêcheur se présente dans les premières pages : « je m’appelle Sacha. Je vais avoir trente ans. Je vis à Druval, dans un presbytère du côté de Caen, et je bois une grande gorgée de vodka avant midi pour me donner la force de démarrer la voiture, d’aller au supermarché, pour oublier mes bourrelets, pour oublier la brume qui change de couleur et la peur qui s’insinue partout. » Il précise que la maison appartient à sa mère, qu’il y est souvent venu pendant son enfance et qu’elle appartenait avant au couple Birkin Gainsbourg. Sacha a décidé de fuir en Normandie suite à son histoire d’amour finie avec Mona, il n’arrive plus à écrire, il est dépressif. Il l’évoque longuement et la reconstitue dans les chapitres écrits en italique. Il s’installe donc à Druval où il va vivre pendant quelques semaines une histoire d’amour incandescente et destructrice avec Léo Le fils du pêcheur. Dans les prolégomènes du roman il écrit : « on m’a tout donné et j’ai tout gâché. Il me reste le souvenir de ces deux amours. Je connais encore le feu de leurs mains. Je sais encore le propre et le sale. Il me reste l’histoire que je vais vous raconter. (...). J’attrape une feuille de papier, un stylo. Vieux réflexe. Je ne sais rien faire d’autre quand je suis seul, quand j’ai mal, quand on me trahit. Je ne sais pas parler de ce qui me fait souffrir, je ne sais que l’écrire. » Le roman ce sont ces deux histoires d’amour successives (une femme puis un homme, Paris et la Normandie) et imbriquées, entremêlées dans la narration. Le constat est amer, ces deux histoires sont douloureuses et fragiles ; le bonheur côtoie la souffrance et la douleur. Alors qu’avec Mona qui se détruisait, était suicidaire et consommait comme lui de la drogue Sacha n’a pas réussi à devenir père ; avec Léo il est subjugué mais leur passion se révèle délétère, l’emprise et la soumission abîment l’amour. Pourtant cela commence bien : « dans ses yeux, il y avait toutes les opportunités ratées, tous les élans que je n’ai pas eus, les regards que je n’ai pas su rendre. » Sacha dès le premier regard est amoureux de ce garçon penché sur le balcon de la maison voisine. C’est le père de Léo qui les met en contact ; dès lors le rapprochement est immédiat, Léo s’installe chez Sacha : « (il) n’est pas parti le lendemain. Il n’a pas traversé la route qui sépare nos deux maisons. Il n’a pas remis son jean. Léo marche pieds nus dans la maison. Pendant la semaine qui suit, nous sommes au lit. (...). Léo a vingt ans. Il termine un BEP mécanique à Caen. (...). Léo est jaloux des garçons avec qui j’ai couché. Les filles, il s’en fout. » Au gré de digressions il mentionne son premier amant à quatorze ans Augustin et D un chanteur sur le déclin avec lequel il a couché. Le narrateur évoque en alternance ses souvenirs de Mona (notamment la période où le père de la jeune femme agonisait) et la passion turbulente avec Léo qui profite de lui et de son argent pour s’acheter des motos qu’il répare et revend. L’amour physique entre les deux garçons est assez peu décrit à l’exception d’une scène initiatique : « je le sens se refermer sur moi. Son bassin monte et descend. Je touche ses fesses, il mord ma joue trop fort, comme pour me rendre un peu de sa douleur. Il me veut en lui. C’est la première fois. Il pousse des grognements. Je sens les poils en bas de son dos. » Malgré le déchirement et la fougue de cette relation désespérée Léo brille sous le regard de son aîné : « Léo serait moins beau s’il n’était pas si malheureux. Ses traits parfaits, sa bouche nerveuse, ses yeux étirés. Tout ça serait banal s’il n’y avait pas ces ombres. Je caresse ses doigts abîmés. » Le prolétaire aspire à gravir les échelons sociaux, malgré la sincérité princeps de son amour, la question de ses ambitions se pose. Mais le narrateur ne creuse pas cette veine il conclut en écrivant : « nous ne sommes pas deux hommes, nous sommes deux détresses. Deux enfants mal finis qui cherchent en l’autre un impossible point de contact. » La fin du roman est moins convaincante que les premiers chapitres. Sacha comprend que son amour éperdu est voué à l’échec, son amant va se mettre en couple avec une caissière normande qui est probablement enceinte de lui. Pour sa part il reste seul et rejoint le cocon familial parisien.

Le fils du pêcheur est un roman passionné et égocentrique. Le protagoniste est un dominant, il n’est pas du même monde que Léo et malgré l’immixtion du personnage de Natacha c’est peut-être leur distance sociale plus que la question de l’homosexualité qui les éloigne. Les deux histoires d’amour sous substance sont d’une noirceur romantique assumée. Le huis-clos normand n’est pas salvateur pour le narrateur qui vit des amours toxiques qui le font sombrer.

Voilà, je vous ai donc parlé du Fils du pêcheur de Sacha Sperling paru aux éditions Robert Laffont.

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