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19 Mai 2021
Aujourd’hui je vais évoquer Monsieur Romain Gary récit très documenté et romancé de Kerwin Spire. Le sous-titre est Consul général de France 1919 Outpost Drive, Los Angeles 28 California. Cet ouvrage passionnant est un complément formidable à l’œuvre de Gary/Ajar et aux biographies comme celle de Dominique Bona.
Dans l’avertissement introductif Kerwin Spire précise : « Monsieur Romain Gary est un récit. Celui d’un homme et celui d’une époque. Le récit de la transformation d’un homme qui, par-delà ses multiples vies, cherche toujours à se réinventer, et le récit d’une époque – l’Amérique des années 1950 – sur laquelle souffle un vent de liberté. » L’auteur s’intéresse à une brève période de la vie de Gary mais qui est décisive dans sa bascule de la diplomatie vers le monde des Lettres. Monsieur Romain Gary couvre les années 1956 à 1960. Il est muté comme Consul général de France à Los Angeles où il s’installe et travaille aux côtés de sa secrétaire adorable. Gary est un séducteur, un homme à femmes. Il est marié mais mène une vie libre malgré la peine que cela procure à son épouse qui est écrivaine anglaise. Voici une brève description des lieux où il s’installe : « au 1919 Outpost Drive, le consulat occupe une grande maison de style espagnol, à la façade blanche et aux huisseries rouges. Située sur les collines, à un bloc de Hollywood Boulevard, le temps semble s’y être arrêté au siècle des dernières conquêtes coloniales. » Romain Gary investit le bâtiment et au début est intéressé par son travail, les rencontres qu’il effectue. Mais c’est un homme libre, ancien pilote et compagnon de De Gaulle il jouit d’une grande autonomie, même s’il rend compte auprès de l’ambassadeur à Washington. Kerwin Spire indique qu’: « en ce printemps 1956, le personnage du diplomate est encore un rôle consenti qui amuse Romain Gary. Non parce qu’il lui procure cette vie sociale à laquelle il ne croit plus depuis longtemps mais parce qu’il le structure dans cette quête perpétuelle de lui-même. » A la fin de cette même année il est couronné par le prix Goncourt pour Les racines du ciel. Il est alors en Bolivie chargé d’une mission diplomatique. Il hésite encore à abandonner la Carrière, ses contacts avec ses supérieurs à Paris au Quai d’Orsay ne sont pas toujours excellents. Cependant : « de retour à Los Angeles, il y a cassure. Écrire est un devoir, une raison d’être, sa raison d’être. Face aux contraintes que lui impose la diplomatie, Gary doit se délier, prendre du champ, se consacrer à son œuvre, encore en chantier. » La perspicacité de ses analyses économiques et politiques est appréciée, il profite de son poste en Californie pour côtoyer Hollywood et négocier les adaptations cinématographiques de ses romans. Il rédige également La promesse de l’aube son œuvre autobiographique centrée sur sa mère Mina. Ainsi : « trois ans après son arrivée à Los Angeles, Romain Gary fait désormais partie du club qui s’appelle Hollywood. Lui qui a grandi dans l’atmosphère des théâtres russes s’est lié d’amitié avec Gary Cooper, dont il apprécie la gentillesse et la douceur ; fréquente John Ford, avec qui il fume des cigares. » C’est lors d’un dîner qu’il rencontre Jean Seberg. Ce sera un moment décisif pour la suite de sa vie : « il est subjugué par la beauté de Jean. Une beauté singulière, presque androgyne, avec cette coupe à la garçonne. Si elle n’a que vingt et un ans et Gary quarante-cinq, se noue ce jour-là, dès le premier instant, une fascination mutuelle entre la jeune vedette de cinéma et l’écrivain-diplomate à succès qui appartiendra bientôt à l’éternité. » Il décide de quitter sa femme et de vivre son amour éperdu pour cette jeune actrice. Force est d’admettre qu’: « à quarante-six ans, il aspire à changer de peau et à recommencer, encore une fois. Alors que son visage s’éclaire en pensant à Jean et que ses troubles s’apaisent, il doit bien l’admettre, elle le rend plus léger et plus joyeux. »
Monsieur Romain Gary est un formidable récit qui se dévore comme un roman. Basé sur des faits réels, il prouve encore une fois la force romanesque de la vie de Romain Gary, aviateur, diplomate et écrivain, formidable mystificateur qui, quelques années après la période décrite dans ces pages, sous une fausse identité, recevra un second prix Goncourt. Cet ouvrage n’est pas le premier qui lui est consacré ; bien après sa mort Romain Gary continue à fasciner et à inspirer les auteurs contemporains comme précédemment François-Henri Désérable.
Voilà, je vous ai donc parlé de Monsieur Romain Gary de Kerwin Spire paru aux éditions Gallimard.
Chronique sur une biographie de l'auteur
La promesse de l'aube - Culture tout azimut
http://culture-tout-azimut.over-blog.com/2018/01/la-promesse-de-l-aube.html
Chronique sur son roman autobiographique
Un certain M. Piekielny - Culture tout azimut
http://culture-tout-azimut.over-blog.com/2017/09/un-certain-m.piekielny.html
Chronique sur un roman sur la jeunesse à Wilmo de Gary