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Culture tout azimut

Ce blog Culture tout azimut vous propose des articles sur des livres récemment lus. Les lecteurs sont invités à partager leurs points de vue.

Mâcher la poussière

Le nouveau roman d'Oscar Coop-Phane

Le nouveau roman d'Oscar Coop-Phane

Aujourd’hui ma chronique est consacrée au nouveau roman d’Oscar Coop-Phane intitulé Mâcher la poussière. Cet auteur, qui n’a pas encore trente ans, a déjà publié trois romans : Zénith-hôtel, Demain Berlin et Octobre. Ces textes brefs ont révélé un talentueux conteur. Oscar Coop-Phane a les bras tatoués, son visage est poupin, ses cheveux sont en bataille. Il semble être devenu écrivain par inadvertance. Dans ses premiers romans il mêle expériences personnelles (vie à Berlin, petits boulots comme barman) et portrait de gens de peu qu’il peint avec bienveillance. Avec son nouvel opus il se lance dans une narration plus ample, plus ambitieuse. Son roman est inspiré d’une histoire vraie qui s’est déroulée en Sicile.

Les prolégomènes, en deux notices, situent l’intrigue du roman. Ces pages introductives suffisent à tout dire sur l’action. Tous les autres chapitres sont constitués d’un huis-clos asphyxiant dont le personnage principal est l’acteur malgré lui. Tout commence donc par un crime perpétré par le baron Stefano qui flingue un enfant qui volait des amandes dans sa vaste propriété. Manque de chance, le gamin était de la famille d’un mafieux. Celui-ci décide alors, en guise de vengeance, de condamner Stefano à une prison dorée dont il n’aura jamais l’autorisation de sortir. Cette prison, c’est l’Hôtel des palmes, un palace de luxe que l’on imagine décadent et décrépi. Sa gloire passée n’est qu’un vieux souvenir sépia. Stefano s’installe dans la chambre 416, suite disposant de toutes les commodités. De longues années durant il va vivre en vase clos dans un périmètre limité. Il devra se contenter de se mouvoir entre sa chambre, le bar, la salle de restaurant, l’ascenseur, les escaliers de service. Plus jamais, il ne mettra un pied hors de l’emprise restreinte de l’hôtel. D’ailleurs, des hommes de main vérifient que Stefano n’essaie pas de sortir, de s’échapper.

Faute de rencontres à l’extérieur, Stefano, dont la richesse semble infinie, fréquente le personnel de l’hôtel. Il ne saurait se suffire de sa solitude. S’il ne veut pas devenir fou et claustrophobe il doit établir des relations. Du directeur de l’établissement au barman, de la femme de chambre au groom, ils sont tous à son service, attentionnés, prévenants. Le baron les soudoie parfois et les récompense pour services rendus. Isabelle, la jeune femme de chambre, devient une proie sexuelle pour lui. Jusqu’au jour où Stefano, pathologiquement jaloux, fomente son renvoi en proférant un mensonge abject. Joseph, le serveur qui compose le cocktail Bloody Mary noue une relation spéciale avec Stefano. Il devient son fournisseur de morphine et d’autres drogues.

Raymond, un écrivain homosexuel français honteux, accompagné de Charlotte, arrive dans le palace alors que Stefano en raison de travaux de rénovation a dû être déplacé dans la chambre 320 en tout point identique à la 416. Raymond cherche à mourir, il a l’intention de se suicider mais n’en a pas le courage. Il sollicite le personnel de l’hôtel, en vain. Stefano, pour sa part, acceptera de lui injecter une dose létale de morphine.

Dans une confession inattendue, le protagoniste revient sur sa claustration et ses raisons : « Stefano dit son crime, la cervelle éclatée du jeune Louis. Il dit sa sentence, la peur puis l’ennui, la morphine qu’il a quittée depuis – Isabelle, Marie et Joseph, chacun a droit à son portrait. Il parle des faits minuscules qui l’absorbent, les automobiles qu’il voit à la fenêtre, celles qui se garent et celles qui passent, les bruits de couloir, les talons qui claquent à l’étage du dessus et qui résonnent comme s’ils lui râpaient le crâne. Puisque la vie de Stefano est essentiellement passée à s’observer, il se raconte tout droit, comme on trace un plan. Il a perdu la fougue de l’esquisse et la beauté des brouillons. Les confessions que l’on fait sur le tard ont souvent tendance à se débarrasser des moulures et des figures de style. Stefano déverse calmement – langue clinique et méthodique. » Le lecteur au fil des pages est confronté aux actes de ce salaud, parfait criminel, froid et méthodique. Ses actes sont abominables. C’est tout le paradoxe de ce personnage dont les agissements sont répréhensibles mais dont la situation d’enfermement contraint induit une certaine empathie. C’est indéniablement un parfait salaud. Bien qu’impardonnable, son comportement provoque une certaine compassion. Le sens du titre du roman demeure obscur, sans doute une référence à l’enfermement de Stefano et à cet hôtel hors d’âge.

Voilà, je vous ai donc parlé de Mâcher la poussière d’Oscar Coop-Phane paru aux éditions Grasset.

Des photos d'Italie du Sud
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